La réforme de l’aide juridictionnelle a conduit les avocats dans la rue.

 
Le problème était et j’espère qu’il restera au passé, était lié à l’article 15 de la loi de Finance pour l’année 2016.
 
Partant du principe que l’Etat n’a plus les ressources pour financer l’aide juridictionnelle en France, il ne cesse de chercher et de proposer des moyens d’en faire baisser le coût.
 
Un jour, le gouvernement va décider de baisser les barèmes d’indemnisation des avocats, un autre jour, il va décider de retirer certaines missions dans la prise en charge des honoraires, un autre jour, il va nous mettre une taxe supplémentaire sous forme de timbre fiscal.
 
Cette fois-ci, il proposait ni plus ni moins aux avocats de contribuer eux-mêmes à ce financement.
 
Notre profession dispose d’une caisse appelée CARPA, qui reçoit les sommes résultant des dépôts effectués par les avocats dans le cadre de dossiers dont ils ont la charge : cession de fonds de commerce, dommages et intérêts, indemnités, ventes aux enchères immobilières…
 
Ces fonds transitent sur ces comptes CARPA et génère des revenus qui servent à financer nos ordres professionnels et le fonctionnement de nos barreaux.
 
Et bien par cette loi, l’état décidait de prélever tous les ans, 15 millions d’euros.
 
La question que l’on peut se poser est la suivante : est-ce qu’on demande à un médecin dont les honoraires sont remboursés par la sécurité sociale, de payer en plus de ses charges une somme destinée à combler le trou de la sécu?
 
Pourquoi exigerait-on d’un avocat ce que l’oserait à peine imaginer d’un médecin?
 
L’avocat a peut-être l’image et c’est d’ailleurs pour cela que lorsque l’on descend dans la rue, on nous regarde souvent avec un petit sourire ironique.
 
Mais croyez bien que la réalité est différente et notamment chez les jeunes avocats.
 
Et s’agissant de leur rémunération au titre de l’aide juridictionnelle, c’est une catastrophe.
 
Prenez l’exemple d’un homme qui passe en jugement devant le Tribunal Correctionnel pour une série de cambriolage qu’il a commis.
 
L’avocat doit commander le dossier, l’étudier et il peut être volumineux.
 
Il doit rencontrer son client, souvent en prison ou à son cabinet pour préparer l’audience. 
 
Parfois le dossier est renvoyé à une audience ultérieure.
 
Enfin, il assiste son client en audience et conclue l’audience par sa plaidoirie.
 
Un dossier peut donc monopoliser entre 10 et 20 heures de travail à son avocat.
 
Savez-vous combien il sera payé par l’Etat? 160 € environ!
 
Donc entre 8 et 16 € de l’heure.
 
Je n’ai rien contre certaines professions mais cela équivaut à la rémunération moyenne d’une femme de ménage.
 
Et si j’ajoute que cette somme ne constitue pas un salaire net mais un honoraires soumis comme tout chiffre d’affaire à des taxes multiples, il reste à peine 60 € dans la poche de l’avocat.
 
Alors imaginez-vous que maintenant, on nous demande de contribuer financièrement à cette rémunération.
 
Cela revient indirectement à devoir travailler gratuitement pour les plus démunis.
 
Ne pensez-vous donc pas que cela justifie une grève des audiences et des manifestations dans toute la France?
 
De plus, ce n’est pas le budget de l’aide juridictionnelle qui grève les finances de l’Etat.
 
Elle coûtait en 2014, 345 millions et a permis à plus de 900.000 personnes de bénéficier gratuitement d’un avocat.
 
Ensuite, il y a peut-être d’autres moyens à mettre en place. 
 
En fonction de sensibilités politiques les propositions sont différentes; certains proposent un relèvement des plafonds de ressources ce qui réduirait le nombre de bénéficiaires, d’autres proposent de baisser les rémunérations des avocats, d’autres encore, proposent de taxer les gros cabinets d’affaires qui ne traitent pas ces affaires…
 
Tout d’abord, les plafonds de ressources sont déjà bas et je ne vois pas comment les baisser encore.
 
En revanche, tout comme je pense que tous les français devraient payer des impôts même symboliquement, tout bénéficiaire de l’aide juridictionnelle devrait régler une sorte de quote-part, de franchise obligatoire.
 
Imaginez qu’une personne bénéficiaire de l’aide juridictionnelle totale, aura droit à un avocat gratuit, un huissier de justice gratuit, un expert judiciaire gratuit. 
 
Et très souvent, l’on constate que certains justiciables partent dans des procédures judiciaires foireuses qu’ils n’oseraient jamais intenter s’il devait, au moins, très partiellement, y contribuer.
 
A l’inverse, un justiciable confiant en sa procédure ne craindra pas d’y investir quelques euros car il sait qu’ils lui seront rendus par le succès qu’il obtiendra de sa procédure.
 
En toutes hypothèses, visiblement le gouvernement a fait marche arrière.
 
S’il n’avait pas choisi de passer en force sans concertation préalable, peut-être aurait-il pris conscience plus tôt de l’aberration de ce texte de loi qu’il avait soumis au vote du parlement.
 
Affaire à suivre lors d’un prochain remaniement ministériel. 

 

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